Non, mon cœur est loyal[1].
En effet, la circonstance le prouve… Ah ! Léonor, puisque vous avez oublié ce que vous me devez, ne pouviez-vous pas au moins vous souvenir que vous étiez chez don Juan ?
En quoi donc puis-je être responsable des folies d’un insensé ?
En effet, j’ai tort. Épargnons de vains discours. — Mon ami, mon cousin, puisque le motif pour lequel vous m’aviez engagé à différer mon voyage n’existe plus désormais, et que les événemens ont tourné contre moi seul, adieu… je pars… Je pars déshonoré de Valence, mais il faut que j’en sorte cette nuit ; mon ennemi dira, s’il veut, que je l’ai fui… mais que m’importe à présent ma réputation, mon honneur ! Adieu… Cette femme que j’ai tant aimée autrefois, mon amitié vous la recommande, non pas, sans doute, pour que vous la gardiez encore chez vous… mais pour que vous permettiez qu’elle aille rejoindre don Diègue… et que tous deux, satisfaits dans leur amour… Mais non, je ne sais plus ce que je dis… Adieu, adieu don Juan.
Ô ciel ! Carlos, attends !
Que voulez-vous encore ?
Si j’ai su…
Assez !
Que don Diègue…
Assez, vous dis-je.
Oh ! oui, assez ! car je ne puis parler… ma voix et ma vue sont sans force… le cœur me manque… Jésus ! Jésus !
Elle est tombée dans mes bras évanouie.
Soutenez-la, cher don Juan. — Ah ! Léonor, tu me tues et je t’adore… et je suis encore plus affligé de tes malheurs que de ta trahison.
- ↑ Mot à mot : « Ce cœur, comme étant vôtre, doit être également perfide. » — « Non, comme étant mien, il est loyal. »