vec la plus vile matière, et l’encre ne se fait qu’avec du poison[1] ! (Il lit.) « Ainsi, tenez-le pour entendu, demain, sitôt après le départ de votre père, je me rendrai, quoi qu’il arrive, dans le jardin que vous m’indiquez. Le ciel vous garde ! » (Il parle.) Que vois-je ! don Félix, sous un prétexte trompeur et secondé par son perfide ami, s’attaque audacieusement à mon honneur !… Que faire, grand Dieu ? Que résoudre dans un moment où je reçois une cruelle injure, et où je perds en même temps tout espoir de réaliser le projet que je formais pour ma fille ?… N’est-il pas singulier qu’au moment où je voulais empêcher mon neveu de se venger, il m’arrive à moi-même un accident qui m’oblige à la vengeance ?… Eh bien ! puisqu’il en est ainsi, et qu’un juste ressentiment l’emporte sur la prudence, je me vengerai de ces deux traîtres ; j’écrirai à Lisardo de se charger de don César, et moi je tuerai en secret don Félix, puisque l’occasion se présente à moi si favorable. (Il ferme la porte par laquelle doña Violante est sortie.) Fermons cette porte avec soin, afin que l’ingrate ne puisse point l’avertir ; et demain, quand le misérabie qu’elle aime viendra au jardin… Mais taisons-nous ; la renommée dira bientôt ma vengeance, et la postérité l’apprendra en frémissant.
Scène III.
Rions, chantons et dansons ; le carnaval est un temps de folies.
Ferme cette fenêtre, Flora, et qu’aucune de vous ne se mette à la jalousie.
Pour Dieu, madame, permettez-moi seulement de regarder cette troupe de masques qui passe devant le palais en chantant.
Rions, chantons et dansons, etc., etc.
Ne m’ennuie pas, je te prie, puisque tu vois que cela me déplaît.
N’entendez-vous pas que les musiciens chantent…
Le carnaval est un temps de folies.
C’est pour cela justement que je veux, moi, être raisonnable.
- ↑ Le papier, comme on sait, se fabrique avec des chiffons, et l’encre avec de la noix de galle.