Grand roi, je me prosterne à vos pieds.
Muley, sois le bien arrivé.
Il arrive toujours heureusement celui qui est reçu dans une sphère aussi brillante, celui qui en entrant au port trouve auprès du soleil une si belle aurore !… (À Fénix.) Permettez-moi, madame, de baiser votre main. (Au Roi.) Il mérite peut-être cette faveur celui qui plein d’affection, de loyauté, de dévouement, ne cherche que le triomphe de vos armes, et qui partit pour vous servir. (Bas, à Fénix.) Et qui revient plus épris que jamais.
Que le ciel me protège ! (Haut.) Sois le bienvenu, Muley. (À part.) Je tremble !
Si mes yeux ne me trompent, j’entrevois un malheur.
Eh bien ! Muley, quelles nouvelles m’apportes-tu ?
Vous montrerez aujourd’hui votre fermeté… Je vous apporte de fâcheuses nouvelles… (À part.) Comme celles qui m’attendent.
Dis-moi tout ce que tu sais. Un homme au cœur ferme montre un égal visage au bien et au mal… Asseyez-vous, Fénix.
J’obéis.
Asseyez-vous toutes. (À Muley.) Achève, et que rien ne t’arrête.
Je ne pourrai ni parler ni me taire. (Haut.) Je suis sorti, selon vos ordres, avec deux galères seulement, pour courir la côte de Barbarie : vous aviez désiré que j’allasse jusqu’à cette ville fameuse autrefois nommée Élise, et située à l’embouchure du détroit ; à cette ville aujourd’hui appelée Ceuta, et dont le nom indique la beauté[2] ; à cette ville que le ciel vous a enlevée pour nous punir probablement des fautes dont nous nous sommes rendus coupables envers notre grand prophète. À la honte de nos armes, nous y voyons flotter aujourd’hui le drapeau portugais ; nous avons sous nos yeux