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Page:Calmet - Traité sur les apparitions des esprits, tome 2, 1751.djvu/157

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REVENANS EN CORPS.

nêtres, de déchirer les habits, de vuider les cruches & les bouteilles. C’étoit un mort bien altéré : je crois qu’il n’épargna que la maiſon du Conſul chez qui nous logions. Cependant je n’ai rien vû de ſi pitoyable, que l’état où étoit cette Iſle.

Tout le monde avoit l’imagination renverſée. Les gens du meilleur eſprit paroiſſoient frappés comme les autres ; c’étoit une véritable maladie du cerveau, auſſi dangereuſe que la manie & que la rage. On voioit des familles entieres abandonner leurs maiſons, & venir des extrémités de la ville porter leurs grabats à la place, pour y paſſer la nuit. Chacun ſe plaignoit de quelque nouvelle inſulte. Ce n’étoient que gémiſſemens à l’entrée de la nuit ; les plus ſenſés ſe retiroient à la campagne.

Dans une prévention ſi générale nous prîmes le parti de ne rien dire ; non ſeulement on nous auroit traités de ridicules, mais d’infidéles. Comment faire revenir tout un peuple ? Ceux qui croyoient dans leur ame que nous doutions de la vérité du fait, venoient à nous comme pour nous reprocher notre incrédulité, & prétendoient prouver qu’il y avoit des Vroucolacas par quelques autorités tirées du P. Richard Miſſionnaire Jéſuite. Il eſt