Page:Cameron - A travers l'Afrique, 1881.pdf/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

n’avais été plus résolu, etc. ; » et lui, il parlait gaiement de son départ : « Le changement de climat lui rendrait la santé ; ses yeux allaient être guéris. » Je prévoyais bien peu que notre séparation définitive ici-bas dût être si prochaine.

De Mkouemmkoué, mes gens continuèrent à se rendre à Taborah ou à Kouiharah, et à ne pas revenir. J’eus recours de nouveau à Ibn Sélim et aux deux frères, Cheikh et Abdallah ; ils promirent de me renvoyer mes hommes, si toutefois c’était possible.

En revenant de cette visite au gouverneur et aux deux fils de Nassib, je fus étonné de voir Murphy dans ma tente. Il venait chercher des médicaments pour le pauvre Dillon, qui, en surcroît de la fièvre, avait une attaque de dysenterie. Néanmoins, leur intention, me dit-il, était de partir sans délai, des mesures ayant été prises pour que le malade fût porté en litière.

Je lui recommandai de me faire prévenir immédiatement, si Dillon allait plus mal, afin que je pusse me rendre auprès de lui ; mais le lendemain, des gens de Livingstone m’apportèrent de bonnes nouvelles, et me dirent qu’ils partiraient le jour suivant.

À force de persévérance, étant parvenu à faire venir mes bagages, je levai le camp et gagnai Itoumvi, gros bourg situé sur la route directe d’Oudjidji, et où je subis de nouveaux délais, par suite du nombre insuffisant de mes porteurs.

Sur le papier, ainsi que d’après le compte des rations, le chiffre des hommes dépassait d’une vingtaine celui des ballots ; mais au moment de partir, il y avait toujours beaucoup d’absents. J’envoyai à leur recherche : on m’en ramenait six ; pendant ce temps-là, vingt autres de mes gens disparaissaient.

Cette conduite exaspérante des porteurs me fit rester à Itoumvi jusqu’au 20 novembre, époque où, réduisant le nombre des charges, en jetant une partie des conserves destinées à mon propre usage, je repris enfin ma route.

J’avais essayé de m’attirer la sympathie du chef et d’acquérir son assistance en lui disant que l’Angleterre était l’amie des noirs, qu’elle désirait que tous les hommes fussent libres et qu’elle faisait les plus grands efforts pour supprimer le commerce d’esclaves.

« Que feront alors les pauvres Arabes, dit-il, si vous arrêtez leur commerce ? » Et tout en reconnaissant que l’esclavage était une mauvaise chose, tout en disant qu’il n’avait jamais vendu d’esclaves, il avouait qu’il en achetait quelquefois.