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Pendant ces discussions, qui les divisaient de plus en plus, les Arabes perdaient leurs alliés indigènes, et Mirammbo acquérait de nouvelles forces.

Asmani n’avait pas vu mon domestique ; il n’en avait pas même entendu parler. Mais ayant confiance en Mélim, et sachant qu’il me suivrait, je me disposai à partir.

Les askaris refusèrent de se mettre en marche. Au lieu de me venir en aide, Bombay soutint les récalcitrants, sous prétexte qu’il fallait leur laisser le temps de nettoyer le grain qu’ils devaient emporter. L’excuse n’était rien moins que valable ; et le 30 décembre, après beaucoup de tracas, je me dirigeai vers un autre Kouikourouh, village populeux qui avait pour chef la mère de Mrima Ngommbé.

Cette vieille dame, remarquablement polie, m’envoya immédiatement de la bière et des œufs, et refusa tout ce que je pus lui offrir en retour, disant que j’étais l’ami de son fils ; que, dès lors, tout ce qu’elle avait était à ma disposition.

Le lendemain matin, au départ, Asmani voulut prendre un chemin de traverse dont il avait entendu parler ; il s’arrangea de manière à le manquer, et nous conduisit en peu de temps au nord-est, au sud-ouest, au levant, au couchant, au midi et au nord.

Une plaie au talon m’empêcha de gagner l’avant-garde et de remettre la caravane en bonne voie. Mon âne, que j’avais prêté à Mohammed, n’était pas arrivé, et Jenny Lind, mon ancienne monture avec laquelle j’étais venu de Bagamoyo, était restée à Hissinéné, car elle était malade. Pour comble de misère, la pluie tomba presque tout le temps ; les chemins étaient détrempés ; en beaucoup d’endroits on enfonçait jusqu’au genou.

Ce fut avec une joie bien grande que j’aperçus le défrichement qui entourait un village. L’instant d’après, j’étais sous la véranda du chef, et tous mes vêtements, à l’exception de ce qu’exigeait la décence, étaient en train de sécher. Comme toujours, une caisse renfermant du linge et des habits de rechange arrivait derrière moi. Enfin un bon feu et une tasse de café brûlant, que m’apporta Sammbo, me remirent à l’état normal.

Dans la soirée, j’essayai de faire quelques relèvements astronomiques pour établir la latitude ; mes mauvais yeux m’en empêchèrent.

La marche avait été si pénible que je résolus d’attendre Mo-