CHAPITRE XV
C’est dans la partie la plus étroite du Tanganyika, près de l’endroit où celui-ci n’a pas plus de quinze milles de large, que s’avance le cap Koungoué.
Après avoir doublé cette pointe, nous passâmes devant de grands monts couverts de bois, et où des torrents et des cascades étincelaient sur les pentes. Au pied de ces montagnes, surtout près de la bouche des torrents, se trouvaient de petites plages, les unes revêtues de sable fin, les autres de cailloux anguleux : fragments de quartz, de granit et de minerai de fer.
Des champs épars dans le fourré indiquaient la retraite de malheureux qui avaient fui devant les chasseurs d’hommes ; pauvres gens condamnés à une misérable existence par les habitants de quelques villages fortifiés, qui saisissent leurs voisins plus faibles et les livrent aux marchands de l’Oudjidji, en échange des denrées qu’ils sont trop paresseux pour produire.
Le soir nous nous arrêtâmes dans la rivière de Lououlouga, près de Kinyari, où les Vouadjidji, qui suivaient la côte avec nous, vendirent leur grain, leur huile, leurs chèvres pour des esclaves, seul objet de troque de la place. Le prix de l’homme y était de quatre à six dotis, ou de deux chèvres ; et comme dans l’Oudjidji l’esclave valait alors jusqu’à vingt dolis, — quarante