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le reconnaître jusqu’à la mer. Saïd Mézroui, qui, à ce sujet, m’avait fait de grandes promesses appuyées, disait-il, sur ses relations avec les chefs, était sans influence aucune. Le sachant bien, il se contentait de demander sans cesse des grains de verre, que je lui refusais avec non moins de persistance, et que, malgré ma défense positive, Bombay et Bilâl lui donnèrent jusqu’au moment où, ayant découvert la fraude, j’enfermai ma verroterie dans le magasin d’un Arabe.

Tanganyika se mit complètement à ma disposition ; mais Dagâmmbé, me dit-il, était regardé par les indigènes comme le chef de l’établissement, et je ne pouvais rien sans lui. Malheureusement, c’était un de ces hommes qui ne comprennent pas que l’on puisse être pressé. Comme je n’étais arrivé que depuis quelques jours, il pensait que je ne devais pas songer à mes canots avant un mois et plus. D’autres notables exprimèrent le désir de m’être utiles, mais plus tard : « Lentement, lentement, me disaient ces prudents personnages ; demain sera aussi bon qu’aujourd’hui ; » et aucune de mes démarches n’aboutissait.

De grands marchés se tenaient tous les deux jours dans l’un ou l’autre des deux quartiers de la station. Les chefs du voisinage et les propriétaires de canots ne manquaient pas ces assemblées, ce qui m’avait donné l’espoir de trouver ce que je cherchais. Mais les seuls objets d’échange qui avaient cours pour les acquisitions importantes, étaient les cauris, les chèvres, les esclaves ; et n’en ayant pas, je ne pouvais traiter aucune affaire.

Tanganyika obtint de plusieurs individus la promesse qu’ils me vendraient leurs bateaux, si je pouvais avoir des cauris ; et il fit passer Bombay de l’autre côté de la rivière, où demeuraient les Vouaghénya, pour qu’il allât dans les bois où se faisaient les pirogues. Pendant ce temps-là, j’attendais.

Les jours de marché, on voyait dès le matin les canots apparaître dans toutes les directions. Ils étaient chargés, à couler bas, d’individus qui amenaient des esclaves, apportaient de la poterie, de l’huile de palme, de la volaille, du poisson, de la farine, du sel, de l’étoffe, des fruits, des légumes : tous les produits de la contrée.

Arrivés au débarcadère, les canots étaient tirés sur la grève, les hommes prenaient les pagaies et se rendaient à loisir sur la