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prendraient les coquilles pour se parer, ne lui en feraient pas de meilleure étoffe, ni de meilleure cuisine, et qu’il aurait un canot de moins.

Je lui offris de doubler la somme, tant je désirais sa pirogue, lui faisant remarquer à mon tour que ses épouses ne porteraient jamais un pareil nombre de colliers. Mais il avait l’esprit du commerce à un degré surprenant ; il répondit que les coquilles dormiraient jusqu’à ce qu’il eût trouvé l’occasion de les troquer pour des esclaves ; tandis que s’il était payé en femmes, il les mettrait tout de suite à l’ouvrage, leur ferait mener ses canots, prendre du poisson, fabriquer de la poterie ou cultiver ses champs ; bref, qu’il n’avait pas besoin d’objets qui ne rapportaient rien.

Dagâmmbé, qui m’avait promis assistance, me disait bien, tous les jours de marché : « Restez là, je vais m’occuper de votre affaire. » Mais je découvris qu’après m’avoir quitté, sous prétexte d’aller me chercher des canots, il entrait par une porte de derrière dans son harem, où il restait jusqu’à la fin de l’assemblée.

Tanganyika était sincère, il faisait tous ses efforts pour m’être utile ; mais sans rien obtenir, même des constructeurs de pirogues.

Tout ce qu’il pouvait faire était de m’offrir le seul canot qu’il possédât ; et comme encouragement, il me fit entrevoir la possibilité d’obtenir des embarcations au retour d’une bande qui guerroyait alors sur l’autre rive : « Cette bande avait des canots ; elle m’en céderait certainement ; et dès que j’en aurais quelques-uns, les naturels ne verraient pas d’inconvénients à ce que j’en eusse davantage. »

Attendre était pénible ; mais je vivais dans l’espérance, et je tuais les heures en causant avec Tanganyika de ses différents voyages. J’appris de sa bouche qu’à partir de Nyanngoué le Loualaba coulait à l’O. S. O. et rejoignait un grand lac où des hommes, qui apportaient des cauris et de l’étoffe, se rendaient dans de grands vaisseaux pouvant contenir deux cents personnes.

À une certaine distance, au couchant de Nyanngoué, se trouvait Méghninna. Des Arabes y étaient allés et me dirent qu’il y avait là des marchands propriétaires de bateaux.

Je voulus partir pour Méghinna ; ma suite ne se trouva pas