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d’amitié ; et, à mon tour, lui donnant des perles, je lui fis observer que, contrairement aux autres chefs de caravane, je ne prenais pas d’esclaves ; je ne demandais qu’à traverser le pays, et à être en bons rapports avec les habitants. Je saisis néanmoins l’occasion de lui dire que si j’étais attaqué, je me défendrais, et que nous étions assez forts pour le faire avec avantage : il le savait déjà.

Je découvris plus tard que Mona Kassannga, qui, dans ces palabres, me servait d’interprète, essaya d’exploiter cette dernière observation et d’en tirer quelque présent pour lui-même. Il est heureux que j’aie fait cette découverte, sans quoi le chef en aurait conclu que je posais pour la générosité, en n’acceptant qu’une chèvre, et que je faisais reprendre sous main le cadeau par mes gens.

Si nous avions été attaqués, c’était parce qu’une bande, appartenant à une caravane portugaise, était venue dans les environs de Kammhouahoué, s’y était livrée à tous les forfaits habituels, détruisant les villages, tuant les hommes, capturant les enfants et les femmes. Voyant que je m’occupais de ces chasseurs d’esclaves, que je m’enquérais de leur nombre, de leur costume, de leurs marchandises, de l’endroit d’où ils venaient, de la route qu’ils avaient prise, les gens du pays me crurent naturellement l’allié de ces hommes, et pensèrent que je devais les rejoindre pour prendre part à leurs atrocités.

Remis en marche, nous traversâmes les districts de Mou Nchkoullah et de Mpannga Sannga, où le chemin se déroulait sur un plateau, coupé de temps à autre par des vallées ; puis ayant franchi la chaîne de Kilimatchio, — un demi-cercle de collines granitiques de toute forme, — nous passâmes plusieurs rivières importantes qui allaient à l’est rejoindre le Loualaba, non pas la branche que Livingstone a vue sortir du lac Moéro, mais celle dont les sources ont été traversées par les pombéiros[1] qui, au commencement de ce siècle, se sont rendus de Cassangé à Têlé.

Un homme du principal village de Mpannga Sannga, homme très intelligent, offrit de me conduire au grand chef de l’Ouroua. Mon guide, pour quelque raison particulière, le dissuada de tenir sa promesse ; d’autre part, il m’affirma que, dans la direc-

  1. Pombéiros, traitants à peau noire des provinces portugaises, souvent des esclaves de confiance dirigeant une caravane. Sur les deux pombéiros en question, voyez Livingstone, Explorations du Zambèse, p. 241. (Note du traducteur.)