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de race blanche qui pourrait me donner d’utiles renseignements. Grande fut ma déception, quand je vis sortir du hamac un affreux vieux nègre.

Certes, il était mis à l’européenne et parlait portugais ; mais c’était là tout ce qu’il avait emprunté à la civilisation, bien qu’il se dit complètement civilisé, à l’égal d’un Anglais ou de tout autre individu à peau blanche.

Un point sur lequel il insista d’une façon particulière fut qu’il ne savait pas mentir : « Sa parole valait un écrit ; il était le plus honnête homme du monde. »

Quand les saluts furent terminés, que je lui eus dit mon nom, mon pays, l’objet de mon voyage, je m’enquis de son histoire, et j’appris qu’il était né sur les bords du Couenza, à Donndo, province d’Angola. Il en était sorti depuis plus de vingt ans, avait passé la majeure partie de ces vingt années en voyages dans l’intérieur de l’Afrique, d’abord en qualité d’agent de traitants portugais, ensuite pour son propre compte.

Son quartier général était, disait-il, à Cassangé, où il me donna à entendre qu’il retournerait bientôt : dès que les gens qu’il y avait envoyés seraient revenus, car il n’avait plus de marchandises. En outre, une partie de sa bande accompagnait Kassonngo dans la tournée que faisait celui-ci pour toucher le tribut et pour châtier les récalcitrants.

Je demandai à Alvez ce qu’il savait du lac Sannkorra, il ne le connaissait que par ouïi-dire, et ajouta que, pour s’y rendre, il fallait traverser le pays du Mata Yafa, où la route était fort dangereuse.

Mata Yafa est la prononciation indigène du titre que porte le chef de l’Oulonnda, titre que nos géographes prennent pour un nom propre, et qu’ils écrivent Mouata Yannvo[1].

J’avais le plus grand désir de visiter la capitale de ce grand

  1. Que Mata Yafa soit la qualification donnée par les Vouaroua au chef suprême des Balonnda, cela n’empêche pas celle de Mata Yannvo ou Yammvo d’être exacte ; et l’on sait, au moins depuis le passage de Livingstone dans le pays même (1854), que ce n’est pas un nom, mais un titre. « Nous rencontrons ici, dit le célèbre voyageur, des messagers qui viennent annoncer à Quenndenndé la mort du grand chef dont Matiamvo (Mouata Yammvo) est le titre héréditaire, mouata voulant dire seigneur. » Plus loin, Livingstone est reçu par un chef voisin du Lonnda, qui lui adresse ces paroles : « Je suis le grand Moéné Katéma, légal du Matiammvo. » Voyez Livingstone, Explorations dans l’Afrique australe, deuxième édition, Paris, Hachette, 1873, p. 319 et 323. (Note du traducteur.)