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marais et à franchir des rivières qui, pour la plupart, allaient rejoindre le Zambèse.

Les quelques villages qui se trouvaient sur la route, villages de construction récente, appartenaient à des natifs du Lovalé, dont la marche vers l’est est rapide. Les habitants avaient des fusils ; et nos hommes du Bihé, si audacieux en face des gens de l’Ouroua, qui ne possédaient que des flèches et des lances, se montraient ici d’une extrême douceur. Dans leur crainte de déplaire aux indigènes, c’est-à-dire dans leur lâcheté, ils allaient jusqu’à se soumettre sans murmure aux exigences les plus déraisonnables.

À mon grand déplaisir, la fuite d’une bande d’esclaves nous arrêta à moins d’un jour de marche du Kafoundanngo, premier district du Lovalé proprement dit. On m’avait représenté ce district comme regorgeant de vivres de toute espèce. Je n’avais plus que du riz et des haricots ; et cette halte, en vue d’une terre de promission, était plus qu’irritante pour un homme affamé.

Le lendemain nous entrions dans ce pays d’abondance. On y voyait beaucoup de petits villages, dont les cases étaient bien bâties et de formes diverses. Les liens des faisceaux d’herbe qui composaient les murailles étaient placés de manière à former des dessins réguliers, et décoraient agréablement l’extérieur de ces maisonnettes.

Quant aux provisions, j’obtins une poule en échange d’un morceau de sel ; mais les habitants ne voulurent pas même regarder mon reste de perles ; ils demandaient de l’étoffe dont ils étaient avides, et que je n’avais pas. Toutes mes valeurs se bornaient à une petite quantité de grains de verre et à sept ou huit de ces ornements en coquillage tirés de la côte orientale et qu’on appelle vionngouas. Je réservai ce dernier article pour acheter du poisson qui devait défrayer mes hommes jusqu’à Bihé.

Pendant que la caravane se ravitaillait, une autre chaîne de vingt esclaves prit la fuite. Un jour fut encore perdu pour attendre Coïmbra, à qui appartenaient les fugitives, et qui naturellement les avait poursuivies. Je suis heureux d’avoir à dire que la recherche fut inutile.

Maintes fois, sur la route, j’avais été navré de l’horrible condition de ces malheureuses qui, accablées de fatigue, à demi mortes de faim, étaient couvertes de plaies résultant de leurs far-