Page:Camille Allary - Au pays des cigales - nouvelles et contes.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il rêvait ainsi profondément. Sa pensée s'envolait vers le village qu'il avait quitté pour venir mordre au pain de l'éducation, au fond de cette grande maison triste où il ne connaissait personne, où sa présence, son air gauche, excitaient les rires et les moqueries. Ah ! comme il souffrait le pauvre petit! On venait de couper ses ailes, et nul ne songeait à le consoler. Il lui prenait de brutales envies de voir sa mère, de l'embrasser, de pleurer avec elle. Il se rappelait le temps où il était libre. Comme ces jours lui semblaient éloignés! L'hiver, lorsque la neige couvrait la campagne à perte de vue, il passait ses journées dans la cuisine, devant l'âtre où petillait un grand feu d'amandiers. Les hommes, assis autour de la table, jouaient à l'écarté, tout en causant. Les femmes filaient ou tricotaient. Quelquefois, afin d'empêcher les enfants de dormir, une bonne vieille, ses besicles sur le