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durant les lentes journées, à demi couché dans la chambre de son frère, malade de haine, d’inquiétude et d’ennui. Le regard de Cimmérion s’attachait à lui avec fixité, puis se reportait sur Alilat. Bientôt Sparyanthis ne douta plus qu’un secret s’élaborât entre eux trois dans la morne interrogation de ce regard déjà vitreux.

Cimmérion taisait quelque chose, une chose dont il ne voulait pas parler, une chose qui voulait être dite et avec laquelle il luttait.

Ses lèvres remuaient, puis son visage redevenait fixe et semblait de quelqu’un qui attend une autre heure, et il y avait des moments où Sparyanthis se roidissait, prêt à se lever, à interroger, à dire tout haut le crime, pour en finir avec cet intolérable supplice du silence !

Enfin, une faiblesse si grande saisit Cimmérion, qu’il parut près de mourir. Et Alilat à son chevet debout, parée selon son désir, scintillante de joyaux, blanche, immuable, semblait déjà son âme au-dessus de lui suspendue. Le prince mourant écarta les gardes et les dignitaires, et tendit la main à Sparyanthis.

« Ô mon frère ! dit-il avec douceur, je vais m’éteindre. Tu es frêle. Le sort de l’Étésie se voile, un nuage éternel va dévorer notre soleil ancien, et ici peut-être se suspendra la vaste lignée des hommes qui édi-