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n’accorderait point de grâce, au premier événement de ce genre dont on pourrait donner la preuve ; le coupable fut arrêté. Sa mère, dans le désordre de sa plus grande douleur, courut se jeter aux pieds de la dauphine, du dauphin et des jeunes princes ; ils obtinrent du roi, après une heure de prière, la grâce tant désirée. Le lendemain, en félicitant madame la dauphine, une grande dame, qui s’était sûrement laissé prévenir contre la mère du gendarme, eut la méchanceté d’ajouter que cette mère n’avait négligé, dans cette circonstance, aucun moyen de réussir ; qu’elle avait sollicité, non-seulement la famille royale, mais même madame Du Barry. La dauphine répondit que ce trait justifiait l’opinion favorable qu’elle avait conçue de cette brave femme ; que, pour sauver la vie de son fils, rien ne devait coûter au cœur d’une mère ; et qu’à sa place, si elle l’eût jugé nécessaire, elle aurait été se jeter aux pieds de Zamore[1].

Quelque temps après les fêtes du mariage, madame la dauphine fit son entrée à Paris ; elle y fut reçue avec des transports de joie. Après avoir dîné dans l’appartement du roi, aux Tuileries, elle fut forcée, par les cris multipliés de la foule qui rem-

  1. Petit Indien qui portait la queue de la robe de la comtesse Du Barry. Louis XV s’amusait assez souvent de ce petit sapajou ; ayant fait la plaisanterie de le nommer gouverneur de Luciennes, on lui donnait 3,000 francs de gratification annuelle.
    (Note de madame Campan.)