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de Chartres, et la reine le tint toujours éloigné de sa société particulière. C’est donc sans aucune espèce de probabilité que quelques écrivains ont attribué à des sentimens de jalousie ou d’amour-propre blessé, la haine qu’il a manifestée contre la reine, dans les dernières années de leur existence.

Ce fut à ce premier voyage de Marly que parut à la cour le joaillier Bœhmer, dont l’ineptie et la cupidité amenèrent, dans la suite, l’événement qui porta l’atteinte la plus funeste au bonheur et à la gloire de Marie-Antoinette. Cet homme avait réuni, à grands frais, six diamans, en forme de poires, d’une grosseur prodigieuse ; ils étaient parfaitement égaux, et de la plus belle eau. Ces boucles d’oreilles avaient été destinées à la comtesse Du Barry, avant la mort de Louis XV.

Bœhmer, recommandé par plusieurs personnes de la cour, vint présenter son écrin à la reine : il demandait quatre cent mille francs de cet objet ; la jeune princesse ne put résister au désir de l’acheter ; et le roi venant de porter à cent mille écus par an les fonds de la cassette de la reine, qui, sous le règne précédent, n’était que de deux cent mille livres, elle voulut faire cette acquisition sur ses économies, et ne point grever le Trésor royal du paiement d’un objet de pure fantaisie : elle proposa à Bœhmer de retirer les deux boutons qui formaient le haut des girandoles, pouvant les remplacer par deux de ses diamans. Il y consentit, et réduisit les girandoles à