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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/153

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des qualités dignes d’obtenir la plus grande popularité. En douterait-on si, comme moi, on l’eût entendue raconter avec délices les détails des mœurs patriarcales de la maison de Lorraine ? Elle disait qu’en les transportant en Autriche, ces princes y avaient fondé l’inattaquable popularité dont jouissait la famille impériale[1]. Elle m’a souvent raconté de quelle manière touchante les ducs de Lorraine levaient les impôts. Le prince souverain se rendait à l’église, me disait-elle ; après le prône il se levait, agitait son chapeau en l’air pour indiquer qu’il allait parler, et disait ensuite quelle était la somme dont il avait besoin. Tel était le zèle des bons Lorrains, qu’on avait vu des hommes dérober, à l’insu de leurs femmes, le linge ou quelques ustensiles de ménage, et aller vendre ces objets pour augmenter la contribution ; aussi arrivait-il souvent que le prince recevait plus d’argent qu’il n’en avait demandé, alors il le faisait rendre.

Tous ceux qui connurent les qualités privées de la reine, savent qu’elle méritait autant d’estime que d’attachement ; bonne et patiente jusqu’à l’excès dans les détails de son service, elle appréciait avec indulgence toutes les personnes qui lui étaient attachées, s’occupait de leur sort et même de leurs plaisirs. Elle avait parmi ses femmes de jeunes

  1. Lisez dans les éclaircissemens historiques (lettre I) des particularités curieuses sur la simplicité de la cour de Vienne.
    (Note de l’édit.)