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La reine fut très-mortifiée des fautes que son frère avait commises ; mais ce qui la blessa le plus, à cette occasion, fut d’être accusée de conserver le cœur autrichien. Dans le long cours de ses malheurs, Marie-Antoinette eut à supporter plus d’une fois cette cruelle imputation ; l’habitude n’avait point tari les larmes que lui coûtait une pareille injustice ; mais la première fois qu’on la soupçonna de ne point aimer la France, elle fit éclater son indignation. Tout ce qu’elle put dire à ce sujet fut inutile ; en servant les prétentions de l’archiduc, elle avait donné des armes à ses ennemis ; ils essayèrent de lui faire perdre l’amour du peuple : on chercha, par tous les moyens, à répandre l’opinion que la reine regrettait l’Allemagne et la préférait à la France.

Pour conserver la faveur inconstante de la cour et du public, Marie-Antoinette n’avait d’autre appui qu’elle-même ; le roi, trop indifférent pour lui servir de guide, ne l’aimait pas encore ; l’intimité qui s’était établie entre eux, à Choisy, n’avait point eu de suite.

Dans son cabinet, Louis XVI s’attachait à des études sérieuses. Au conseil, il s’occupait du bonheur de son peuple ; la chasse et des occupations mécaniques remplissaient ses loisirs, et il ne songeait pas à se donner un héritier.

Le sacre du roi eut lieu à Reims avec la pompe usitée. À cette époque, Louis XVI éprouva ce qui peut et doit le plus toucher le cœur d’un souverain vertueux. L’amour que le peuple avait pour lui