Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/165

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

éclatait avec ces transports unanimes qu’on peut distinguer aisément des mouvemens de la curiosité ou des clameurs que poussent les partis. Il répondit à cet enthousiasme par une confiance honorable pour un peuple heureux d’être soumis à un bon roi ; il voulut se promener plusieurs fois sans gardes au milieu de la foule qui le pressait et le bénissait. J’ai remarqué dans ce temps l’impression que fit un mot de Louis XVI. Le jour de son couronnement, au milieu du chœur de la cathédrale de Reims, il porta la main à sa tête lorsqu’on y posa la couronne, et dit : « Elle me gêne. » Henri III avait dit : « Elle me pique. » Les témoins les plus rapprochés du roi furent frappés de cette similitude entre ces deux exclamations, et cependant on peut juger que ceux qui avaient l’honneur d’être ce jour-là assez près du jeune monarque pour entendre ce qu’il disait, n’étaient point de cette classe que des lumières bornées rendent superstitieuse[1].

Dans le temps où la reine délaissée ne pouvait pas même espérer le bonheur d’être mère, elle eut

  1. Le récit du sacre de Louis XVI est curieux pour la génération nouvelle, parce qu’on y retrouve tous les usages de l’ancienne monarchie. Plusieurs circonstances peignent d’ailleurs, sous le jour le plus favorable, le caractère du roi et de Marie-Antoinette. Mais comme ces détails sont extraits d’un ouvrage publié en 1791, il ne faudra pas être surpris de les trouver fortement empreints de l’esprit et des opinions du temps. (Voyez la lettre L.)
    (Note de l’édit.)