Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/231

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Italien ; Sa Majesté changea d’avis, et se rendit aux Français. Elle envoya un page aux Italiens prier son frère de venir la rejoindre. L’empereur sortit de sa loge, éclairé par le comédien Clairval, et accompagné de M. de La Ferté, intendant des menus-plaisirs, qui souffrit beaucoup d’entendre Sa Majesté Impériale dire à Clairval, en lui exprimant obligeamment son regret de ne point assister à la représentation des Italiens : « Elle est bien étourdie votre jeune reine ; mais heureusement cela ne vous déplaît pas trop à vous autres Français. »

Je me trouvais avec mon beau-père dans un des cabinets de la reine ; l’empereur vint l’y attendre, et sachant que M. Campan remplissait les fonctions de bibliothécaire, il l’entretint des livres qui de-

    en les regardant : Voilà une si charmante aurore, qu’elle promet plus d’un beau jour.

    » Un trait, ajoute-t-elle, que j’aime mieux que tout cela, est celui-ci :

    » Il passa le bois de Rosny, tandis qu’il dormait dans sa voiture ; quand il se réveilla, il en était à un quart de lieue. Se rappelant que Sully avait, durant les guerres civiles, vendu ce bois pour en donner l’argent à Henri IV, alors dénué de tout, l’empereur ordonna aux postillons de retourner sur leurs pas et de rentrer dans le bois, voulant mesurer, par ses yeux, l’étendue du sacrifice qu’un grand homme et un sujet affectionné avait fait, dans un moment de détresse, à l’un de nos plus grands rois*.

    (Note de l’édit.)

    *. « Ce bois est immense : Sully en retira trente mille francs, somme énorme dans ce temps, et la donna tout entière à Henri IV. »

    (Note de madame de Genlis.)