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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/243

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revoir sa terre natale le décida sans doute à subir cette loi, mais il s’en vengea en faisant contraster avec la longue queue de sa robe et ses manchettes à triple étage, les attitudes et les propos d’un grenadier, ce qui lui donna le ton de la plus mauvaise compagnie.

Enfin l’événement tant désiré par la reine et par tous ceux qui lui étaient attachés arriva. Sa Majesté devint grosse ; le roi en fut ravi. Jamais on n’a pu voir d’époux plus unis et plus heureux. Le caractère de Louis XVI était tout-à-fait changé, prévenant, soumis ; il avait subi le joug de l’amour, et la reine était bien dédommagée des peines que l’indifférence du roi lui avait fait éprouver pendant les premières années de leur union.

L’été de 1778 fut extrêmement chaud : juillet et août se passèrent sans que l’air eût été rafraîchi par un seul orage. La reine, incommodée par sa grossesse, passait les jours entiers dans ses appartemens exactement fermés, et ne pouvait s’endormir qu’après avoir respiré l’air frais de la nuit, en se promenant, avec les princesses et ses frères, sur la terrasse au-dessous de son appartement. Ces promenades ne firent d’abord aucune sensation ; mais on eut l’idée de jouir, pendant ces belles nuits d’été, de l’effet d’une musique à vent. Les musiciens de la chapelle eurent l’ordre d’exécuter des morceaux de ce genre, sur un gradin que l’on fit construire au milieu du parterre. La reine, assise sur un des bancs de la terrasse, avec la totalité de la famille