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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/245

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amusa beaucoup. Un jeune commis de la guerre assez spirituel et d’un fort bon ton, ne reconnaissant pas ou feignant de ne pas reconnaître la reine, lui adressa la parole : la beauté de la nuit et l’effet agréable de la musique furent le motif de la conversation ; la reine, ne se croyant pas reconnue, trouva plaisant de garder l’incognito ; on parla de quelques sociétés particulières de Versailles, que la reine connaissait parfaitement, puisque toutes étaient formées de gens attachés à la maison du roi ou à la sienne. Au bout de quelques minutes, la reine et les princesses se levèrent pour se promener, et saluèrent le commis en quittant le banc. Ce jeune homme, sachant ou ayant découvert qu’il avait parlé à la reine, en tira quelque vanité dans ses bureaux. On le sut, on lui fit dire de se taire, et on s’occupa si peu de lui, que la révolution le trouva encore simple commis de la guerre. Un autre soir, un garde-du-corps de Monsieur, étant venu de même se placer auprès des princesses, les reconnut, quitta la place où il était assis, et vint en face de la reine lui dire qu’il était bien heureux de pouvoir saisir une occasion d’implorer les bontés de sa souveraine ; qu’il sollicitait à la cour… Au seul mot de sollicitation, la reine et les princesses se levèrent précipitamment, et rentrèrent dans l’appartement de Madame[1].

  1. Soulavie a dénaturé ces deux faits de la manière la plus criminelle.
    (Note de madame Campan.)