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rain, ses relations avec le comte de Vergennes, depuis la révolution de Suède en 1772, le caractère de son favori Armsfeld, les préventions de ce monarque contre les Suédois bien vus à la cour de Versailles, formaient les bases de cet éloignement. Il vint un jour demander à dîner à la reine sans être prié, et sans avoir fait connaître son projet. La reine le reçut dans le petit cabinet, et me fit demander de suite. Alors elle m’ordonna de faire à l’instant appeler le contrôleur de sa bouche ; de s’informer si elle avait un dîner suffisant pour l’offrir à M. le comte d’Haga, et de le faire augmenter si cela était nécessaire. Le roi de Suède l’assurait qu’il y aurait toujours assez pour lui ; et moi, pensant à l’étendue du menu du dîner du roi et de la reine, dont plus de la moitié ne paraissait pas quand ils dînaient dans les cabinets, je souriais involontairement. La reine me fit, des yeux, un signe imposant, et je sortis. Le soir, la reine me demanda pourquoi j’avais paru si ébahie quand elle m’avait donné ordre de faire augmenter son dîner ; que j’aurais dû juger de suite la leçon qu’elle donnait au roi de Suède pour sa trop grande confiance. Je lui avouai que la scène m’avait paru si bourgeoise, qu’involontairement j’avais pensé aux côtelettes sur le gril, et à l’omelette qui, dans les

    tion qui abaissa l’autorité du Sénat. On sait qu’il périt en 1792, assassiné dans un bal masqué, par Ankastroom.

    (Note de l’édit.)