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rieure : on y voyait une atteinte portée aux usages de la monarchie, et les usages tiennent de près aux lois. La reine en fut instruite et crut que sa dignité serait compromise, si elle faisait changer la forme de ces règlemens, qui même pouvait être supprimée sans inconvénient. « Mon nom n’est point déplacé, disait-elle, dans les jardins qui m’appartiennent ; je puis y donner des ordres sans porter atteinte aux droits de l’État. » Ce fut la seule réponse qu’elle fit aux représentations que quelques serviteurs fidèles crurent pouvoir se permettre de lui adresser à ce sujet. Le mécontentement que les Parisiens en manifestèrent porta sans doute M. d’Esprémenil, à l’époque des premiers troubles du parlement, à dire qu’il était également impolitique et immoral de voir des palais appartenir à une reine de France[1] : ainsi, un

  1. La reine n’oublia jamais cette offense de M. d’Esprémenil ; elle disait qu’ayant été faite dans un temps où l’ordre social n’était pas encore troublé, elle en avait éprouvé la peine la plus vive. Peu de temps avant la chute du trône, M. d’Esprémenil ayant embrassé hautement le parti du roi, fut insulté, par les jacobins, dans le jardin des Tuileries, et si maltraité qu’on le rapporta chez lui fort malade. À raison des opinions royalistes qu’il professait alors, quelqu’un invita la reine à envoyer savoir de ses nouvelles ; elle répondit qu’elle était vraiment affligée de ce qui arrivait à M. d’Esprémenil, mais que la politique ne la mènerait jamais jusqu’à donner des preuves d’un intérêt particulier à l’homme qui, le premier, avait porté l’atteinte la plus outrageante à son caractère.
    (Note de madame Campan.)