Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

donna l’ordre à un gentilhomme d’aller prendre l’archiduchesse Marie-Antoinette et de l’apporter à sa voiture. Quand elle fut arrivée, il tendit les bras pour la recevoir, et dit après l’avoir pressée contre son cœur : « J’avais besoin d’embrasser encore cet enfant. » L’empereur mourut subitement pendant ce voyage, et ne revit jamais sa fille chérie.

La reine parlait souvent de sa mère avec un profond respect, mais elle avait formé tous ses projets pour l’éducation de ses enfans d’après les choses essentielles qui avaient été négligées dans la sienne. Marie-Thérèse, imposante par ses grandes qualités, inspirait aux archiduchesses plus de crainte et de respect que d’amour ; c’est au moins ce que j’ai remarqué dans les sentimens de la reine pour son auguste mère ; aussi désirait-elle ne jamais établir entre elle et ses enfans cette distance qui avait existé dans la famille impériale. Elle en citait un effet funeste, et qui lui avait fait une impression si forte que le temps n’avait pu l’effacer. Lorsque l’empereur Joseph II perdit sa femme, elle lui fut enlevée en peu de jours par une petite vérole de la plus mauvaise qualité. Son cercueil venait d’être déposé dans le caveau de la famille impériale. L’archiduchesse Josèphe, accordée au roi de Naples, au moment de quitter Vienne, reçut de l’impératrice l’ordre de ne point partir sans avoir été faire une prière dans le caveau de ses pères ; la jeune archiduchesse, persuadée qu’elle gagnerait la ma-