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— Allons, mon cher Victor, je vois que tu as pris un verre de trop, car tu commences à perdre la carte ! Je me moque bien de tes injures, mon petit…

— Je n’ai pas l’intention de te dire des injures, et d’ailleurs ce n’est pas de ma faute si la vérité ressemble parfois à des injures… mais c’est la vérité que je te dis ; et je viens charitablement t’avertir que tu ferais mieux de ne plus remettre les pieds chez M. de LaRue, car ce monsieur veut donner la main de sa fille à un professionnel, entends-tu ? et non à un habitant, et c’est le notaire Lormier qui est aujourd’hui le fiancé de Corinne !

— Victor, j’espère que tu n’es pas sérieux ! mais, dans tous les cas, je te défends de profaner ainsi le nom de Melle de LaRue !

— Je suis très sérieux, au contraire ! J’aime cette jeune fille ; et le rang élevé que j’occupe dans la société, en ma qualité seule de notaire public, me donne le droit d’aspirer à l’honneur de devenir son époux, tandis que ta condition inférieure d’habitant te défend même d’oser parler à cette jeune fille, dont le père, grâce à mon travail, occupera bientôt un siège au parlement… Vas-tu comprendre enfin la distance qu’il y a entre elle et toi ?…

Je comprends que tu délires, et je te conseille d’aller te coucher… demain, tu penseras à autre chose… oui, va te coucher, mon petit !