Page:Caouette - Le vieux muet ou un Héros de Châteauguay, 1901.djvu/391

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 384 —

peaux qui flottent au-dessus de cette paroisse — dont vous avez été le maire le plus dévoué — et qui se rappelle vos bienfaits et vos vertus. »

Jean-Charles fut quelques secondes sans pouvoir parler ; mais grâce à la fermeté de son caractère, il surmonta la vive émotion qu’il ressentait. Il prit la parole en ces termes :

« M. le maire, mesdames et messieurs,

« Pardon ! merci ! voilà les deux mots qui montent à cet instant de mon cœur à mes lèvres !

Avant de vous témoigner ma reconnaissance, je dois vous demander pardon d’avoir douté, à l’heure de l’épreuve, de votre loyale amitié. Oui, au lieu de quitter ma paroisse natale en déserteur, comme je l’ai fait, je comprends maintenant que j’aurais dû rester à mon poste, et vous laisser le soin de faire éclater mon innocence ! Mais… mais, hélas ! le malheur qui venait de m’atteindre était si grand et si inattendu, que mon esprit en fut affecté autant que mon cœur…

Je n’essaierai pas de vous peindre mes souffrances ; vous les comprenez et vous les exprimez dans votre adresse par ce mot : le martyre !

Ah ! oui, l’exil est vraiment un martyre ! J’en ai senti toutes les tristesses et tous les ennuis pendant mon séjour de quinze ans aux États-Unis. C’est pour m’y soustraire, que je revins, il y a douze ans, à Québec, afin d’y con-