Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/34

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conseil à vous donner. Mais vous avez eu tort de manquer de confiance en moi. Tant pis pour vous !

Farjolle fit mine de s’en aller, Borck qui craignait de s’être fait un ennemi, le rattrapa.

— Écoutez, mon cher monsieur Farjolle, l’affaire n’est pas encore conclue. Voyez Velard, entendez-vous avec lui… Enfin, arrangez-vous. Si vous pouviez faire l’affaire à vous deux, ça vaudrait mieux. Revenez me trouver demain…

Farjolle sortit du magasin, un peu consolé. Mais ce petit Velard, vingt-cinq ans, imberbe, quel aplomb tout de même ! Il l’admirait malgré sa déception. En dînant, il raconta tout à Emma, qui lui dit :

— Il n’est pas plus fort que toi, ce Velard. Seulement, il a plus l’habitude du métier, il est plus actif. Tâche de te lier avec ce garçon. Voilà de bonnes relations dans ta partie.

— Je le connais un peu, j’ai joué à l’écarté contre lui, au cercle où il déjeune presque tous les matins. J’irai demain, à onze heures…

On déjeunait dans la vaste salle à manger du cercle, par petites tables de deux, de quatre, de huit. Le repas coûtait quatre francs, café compris. On prenait un ticket, en entrant, et on le remettait après les hors-d’œuvre au maître d’hôtel. L’administration avait renoncé au crédit à cause de l’abus. Les membres du cercle sérieux, ceux qui exerçaient une profession, les gens d’affaires, déjeunaient à onze heures ; à midi et demi ou une heure, arrivaient les oisifs, couchés tard, ayant joué au baccarat une partie de la nuit, éreintés. Ordinairement, ils causaient, pendant tout le repas, des coups surprenants qu’ils avaient subis la