Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/11

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— Bonsoir ! répondait-il. Et il passait sans s’occuper de leur manège, le long des magasins fermés.

À minuit, elles étaient encore là, sur les trottoirs dont elles frappaient l’asphalte des hauts talons de leurs bottines et cinq ou six d’entre elles, qui remontaient, très tard, la rue Saint-Denis, s’accroupissaient devant le soupirail de la boulangerie et demandaient qu’on leur vendît un morceau de pain chaud… Elles avaient une ficelle qu’elles jetaient tour à tour dans la cave avec des sous… et elles attendaient pour la retirer que le morceau de pain, noué à son extrémité, y suspendît un poids.

Lampieur abominait ces filles. Leurs voix rauques et effrontées qui le hélaient de dehors, leur présence dans la rue, à cette heure où n’erraient plus que les agents, des passants isolés, des ivrognes et ces ombres singulières qui semblent se mouvoir sans corps, lui étaient insupportables. En outre, ces malheureuses le dérangeaient dans son travail et lui causaient toujours une sombre irritation. Qu’avaient-elles donc à l’appeler ainsi ?… C’est bon ! C’est bon ! Il y