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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/141

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grotesques, inoffensifs. Qu’avaient-ils à tout observer ? Lampieur ne se souciait d’eux en aucune manière. À leur indiscrétion, il opposait une machinale rudesse. De même pour son travail. Il l’accomplissait, on eût dit presque sans y prendre part, comme un mécanisme qui fonctionne et débite la besogne avec une méthodique indifférence. C’était le cas pour Lampieur. Dans la cave, près du four, il ne s’y trouvait pas. Son corps seul y peinait, l’esprit était ailleurs, très loin, là-bas ou à côté, ou peut-être même dans cette cave, mais employé à une toute autre fonction.

Dans de pareils moments, Lampieur oubliait Léontine ; elle ne lui était rien ou plutôt elle ne se rattachait que par de soudains raccourcis à telle ou telle pensée, et cela n’avait pas d’importance. Le seul fait grave pour Lampieur était que, maintenant, il songeait à son crime et que, sans en souffrir, il en était importuné. Déjà, à cinq ou six reprises, il avait dû se ressaisir et faire effort sur sa mémoire pour admettre que ce crime, lui, Lampieur, l’avait réellement commis. Il lui arrivait, en effet,