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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/145

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récompensait de reporter sur lui tout ce confus besoin qu’ont les femmes de se dévouer à l’homme qu’elles aiment et de prendre à leur charge ses plus sombres soucis.

La nuit, quand dans les rues Léontine retrouvait ses semblables, cette singulière félicité l’accompagnait et la fortifiait davantage dans ses résolutions. Elle voyait Lampieur… Elle l’imaginait, dans la cave, travaillant et se surveillant… L’idée du crime la dominait. Léontine n’en avait plus horreur : elle était faite à cette idée ; elle en avait pris l’habitude. Bien plus, c’était pour elle le seul moyen de s’identifier à Lampieur et de ne pas l’abandonner, fût-ce un instant, aux conséquences du meurtre dont il était l’auteur. Ces conséquences étaient terribles. Mais elles avaient aussi l’attrait inexprimable du châtiment et d’une puissante détresse. Léontine le savait… Elle savait aussi que Lampieur, si rude qu’il fût, était un homme et qu’il pouvait être amené, comme elle, à cet attrait qu’exerce tout châtiment sur qui l’a mérité. Cela lui était odieux. Elle ne voulait pas s’y soumettre et, en même