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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/231

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croisait en chemin et avilie comme elles, Lampieur n’en était plus honteux. Il oubliait son juste écœurement. Il n’avait plus de jalousie ni de colère. Que lui importaient tant d’ignominies ? Il était prêt à les excuser chez Léontine, à les tolérer, à les accueillir sans compter et à n’y faire aucune allusion. C’était encore par sa très grande faute que Léontine avait repris son ancienne vie et, devant elle, il estimait, avec sévérité, qu’il en était coupable et il s’en accusait…

À la fin, Lampieur, se chargeant de mille torts et les exagérant comme à dessein, perdit tout contrôle sur lui-même. Où qu’il portât ses pas, il ne trouvait pas Léontine. Elle n’était nulle part. Il avait beau pousser plus loin et stationner ici ou là près des hôtels, près des bistros, d’autres filles que celle qu’il cherchait venaient à lui. Il les écartait, en silence. Ces filles, qu’il avait plusieurs fois croisées, le reconnaissaient et elles n’insistaient pas. Elles le laissaient poursuivre sa ronde extravagante. Elles ne s’en occupaient point et Lampieur, les voyant s’éloigner, se disait, avec une infinie détresse,