Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/32

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douloureux qui se lisait dans son regard. Et elle se tenait debout, par moment, devant lui et, en même temps qu’il la voyait, à être sûr qu’il n’avait qu’à étendre le bras pour la toucher, Lampieur l’entendait marcher dehors et il reconnaissait son pas.

— Quoi ? Quoi ? bégayait-il, furieusement.

Il tentait alors de reprendre ses esprits et de venir à bout de la terreur qui le traquait au fond de l’être. Mais le souffle lui manquait… Il tremblait. Une abondante transpiration dégouttait de ses membres et il craignait, dans le cas où il aurait été capable d’appeler Léontine, qu’elle ne répondît pas. Pourtant il ne doutait pas qu’elle ne se tînt, là-haut, contre la devanture fermée. C’était elle qui marchait là-haut… elle et non pas une autre. Dès que la nuit tombait, un besoin maladif devait l’obliger à remonter la rue, à tourner comme une âme en peine autour de la boulangerie, à s’approcher du soupirail, à y choisir une place et à y demeurer, durant des heures entières, sans bouger… Pourquoi n’aurait-elle pas répondu ? Peut-être attendait-elle qu’on appelât ? Qu’est-ce qui empêchait donc