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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/54

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et ne pouvait plus avancer. Ses pieds semblaient rivés au sol ; tout ce qu’elle voyait, qui l’entourait, entrait tumultueusement dans son cerveau pour y semer un grand désordre. Elle ne comprenait plus. Elle regardait. Sa souffrance avait l’air de lui échapper. Ce n’était pas de la souffrance ; c’était un pêle-mêle de sensations et d’associations d’idées des moins précises ; une sarabande invraisemblable d’images et de souvenirs ; une ronde extravagante… Sans doute c’était une cave que cet endroit. Là, était le pétrin mécanique ; là, le foyer du four ; là, le trou blême du soupirail et là, près d’elle, l’homme qui se trouvait d’habitude dans la cave quand elle venait chercher du pain. Puisque Lampieur se trouvait dans cette cave, qu’est-ce que Léontine y faisait ? Elle n’avait point imaginé que Lampieur serait là. Sa présence dérangeait tout. Elle empêchait absolument Léontine de revenir en arrière, de communiquer avec elle-même, de se confronter avec elle-même, enfin de ressentir, dans toute l’horreur à quoi elle s’attendait, la sensation de découvrir une autre fois, mais en y pénétrant,