Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/90

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plis humides de sa jupe et regardait ses chaussures sous la chaise pour ne pas être tentée de prendre part à la conversation. Qu’aurait-elle ajouté à ces plaintes ? Elle en aurait trop dit. Et le souvenir de Lampieur, qui demeurait pour elle gros de menaces et de détresse incohérente, interdisait à Léontine de raconter ses impressions. Ce n’était après tout, songeait-elle attentive aux paroles prononcées à sa table, que des impressions. Que savait-elle de plus ? Elle ne voulait rien en conclure. Si fortes qu’elles fussent, ces impressions n’impliquaient pas formellement que Lampieur eût tué. Léontine avait pu le croire… Peut-être même le croyait-elle encore… Fallait-il en déduire qu’elle était dans le vrai et qu’il dépendait d’elle de sauver ou de perdre Lampieur ? Cela la dépassait… Pourtant, la terreur qu’inspirait à la malheureuse la scène qu’elle venait d’avoir avec cet homme l’animait contre lui d’un sourd ressentiment. Léontine, à présent encore, en était pénétrée. Mais ce ressentiment ne s’exerçait que vis-à-vis de Lampieur et non vis-à-vis de l’assassin. Qu’il fût un assassin, cela ne concernait pas,