Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/170

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chaine. Il fut l’écho sonore des hymnes de tristesse comme des cantiques d’espérance.

Jusqu’à la fin de la restauration on continuait avec le plus beau sang-froid, dans tous les séminaires, à mettre des arguments en forme contre les hérésiarques, depuis Eutychès jusqu’à Jansénius, sans s’inquiéter jamais des travaux de la critique contemporaine de l’un et de l’autre côté du Rhin, travaux dont on ignorait l’importance. Pour le clergé, auquel la science théologique ne manquait pas d’ailleurs, ces travaux-là semblaient ne point exister : et lorsqu’il arrivait à l’épiscopat de les mentionner dans ses mandements, c’était moins souvent pour les réfuter que pour en signaler l’audace aux sévérités de la justice. On arrive donc à comprendre que, la passion aidant, les éclectiques et les saint-simoniens en fussent venus à se représenter la vivante science de Dieu, plus grande que le monde puisqu’elle l’embrasse tout entier, sous les traits anguleux de ces statues de granit fixées aux niches de nos cathédrales par la main des générations éteintes.

Le renouvellement des travaux scientifiques dans un esprit chrétien n’avait pas moins d’importance que celui des études théologiques proprement dites, et ce travail était encore plus négligé. La grande conspiration des sciences et de l’histoire ameutées contre les traditions mosaïques avait pris fin, sans doute ; et Dieu séparant, encore une fois, la lumière des ténèbres semblait éclairer d’une nouvelle lumière l’œuvre mystérieuse des six jours. L’apparition récente de l’homme