Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/65

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la reconstitution de la France sur ses véritables bases politiques et religieuses.

Toutes les questions qui se rattachent à la fondation d’institutions aristocratiques, toutes celles qui touchent aux rapports de l’Église et de l’État étaient agitées dans les grands salons de la rive gauche tout aussi bien que dans les populeux faubourgs de la rive droite. Pendant que MM. Bergasse et Cottu publiaient des recettes pour faire pousser en France les aristocrates comme des champignons, le projet de loi sur le droit d’aînesse organisait, en plein faubourg Saint-Germain, la conspiration des filles et des cadets. Enfin les questions religieuses, soulevées par l’école de l’abbé de Lamennais, dans leurs diverses applications sociales, venaient se placer au premier rang dans les préoccupations générales, et rendre aux passions voltairiennes tout le terrain que leur avaient fait perdre les discussions politiques. Le clergé redeviendrait-il un ordre dans l’État, reprendrait-il, avec la jouissance de ses propriétés anciennes non vendues, la tenue des registres de l’état civil ? Dans quel sens fallait-il entendre la liberté de conscience garantie par la Charte, et quelles conséquences ultérieures aurait, sur les lois de la presse et sur l’ensemble de notre législation pénale, le principe qui venait d’être posé dans la loi du sacrilège ? Ces redoutables problèmes, qui surexcitaient les plus mauvaises passions, étaient journellement discutés à la Courtille entre deux cotillons, comme chez lady Granville entre deux quadrilles. Je vois encore une blonde Anglaise, toute pourpre de colère, abusant