Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/101

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rite de la méthode des indivisibles, mais encore en ce qu’il prouve que la notion de l’infini mathématique, dans le sens même qu’on lui attribue aujourd’hui, n’était point étrangère à ces géomètres ; car il est clair par ce qu’on vient de citer de Pascal, qu’il attachait au mot indéfini la même signification que nous attachons au mot infini, qu’il appelait simplement petit ce que nous appelons infiniment petit, et qu’il négligeait sans scrupule ces petites quantités vis-à-vis des quantités finies : car on voit que Pascal regardait comme de simples rectangles les trapèzes ou petites portions de l’aire de la courbe comprises entre deux ordonnées consécutives, négligeant par conséquent les petits triangles mixtilignes qui ont pour bases les différences de ces ordonnées. Cependant personne n’a tenté de reprocher à Pascal son défaut de sévérité.

Roberval emploie continuellement les expressions même d’infini et d’infiniment petit, dans le sens qu’on leur donne aujourd’hui, et il dit formellement qu’on doit négliger les quantités infiniment petites vis-à-vis des quantités finies, et celles-ci vis-à-vis des quantités infinies.

On savait donc dès ce temps-là que la méthode des indivisibles et toutes celles du même genre qu’on pourrait imaginer n’étaient autre chose que des formules d’abréviation, très utiles pour éluder les longueurs de la méthode d’exhaustion, sans nuire en aucune manière à l’exactitude de ses résultats.

Les géomètres qui sont venus ensuite en usaient de même depuis longtemps, lorsque les calculs différentiel et intégral furent imaginés. Il n’est donc pas étonnant que Leibnitz ne se soit pas attaché à démontrer rigoureusement un principe qui était généralement reconnu comme un axiome. Les objections ne se sont élevées contre ce principe que quand il a été réduit en algorithme, comme si l’on avait regretté que les routes scientifiques jusqu’alors si difficiles à parcourir eussent été tout d’un coup aplanies et rendues accessibles à tout le monde. Je termine ces observations par un ou deux exemples.


117. L’algèbre ordinaire enseigne à trouver la somme d’une suite quelconque de termes pris dans la série des nombres naturels ; la somme de leurs carrés, celle de leurs cubes, etc., et cette connaissance fournit à la géométrie des indivisibles le