Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/129

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est très-lumineux, on ne peut se dissimuler qu’ils ne font qu’éluder la difficulté sans la résoudre ; que la méthode des limites ne mène aux résultats de l’analyse infinitésimale que par une route difficile et détournée ; et qu’enfin cette méthode, loin d’être la même que celle du calcul de l’infini, n’est au contraire que l’art de s’en passer et d’y suppléer par le calcul algébrique ordinaire : en quoi l’on réussirait d’une manière plus simple, à ce qu’il me semble, par la méthode des indéterminées.


153. Il suit de ce que nous venons de dire, qu’on peut à volonté considérer les quantités infiniment petites ou comme absolument nulles, ou comme de véritables quantités ; un motif cependant me ferait préférer cette dernière manière d’envisager l’analyse infinitésimale : c’est que ceux qui la considèrent ainsi me semblent traiter la question d’une manière plus générale que les autres. Car ceux-ci, en attribuant aux quantités infiniment petites la valeur 0, font une opération inutile : ils paraissent regarder cette détermination comme nécessaire, et penser que sans elle ils ne pourraient obtenir ce qu’ils cherchent ; or c’est ce qui n’est pas, puisque ces quantités peuvent toutes s’éliminer sans conditions, c’est-à-dire sans qu’on leur attribue aucune valeur déterminée, et pas plus celle qui est 0 qu’aucune autre. La question parait donc résolue d’une manière générale, lorsqu’on laisse dans l’indétermination des quantités qu’on n’est pas obligé de déterminer.

de la théorie des fonctions analytiques ou fonctions dérivées.

154. Aucune des méthodes pratiquées ou proposées jusqu’à ce jour pour suppléer à la méthode d’exhaustion des anciens, et pour la réduire en algorithme régulier, n’a paru à Lagrange réunir au degré désirable l’exactitude et la simplicité requises dans les sciences mathématiques. Il a pensé néanmoins qu’il n’était pas impossible d’atteindre ce but important, et ses recherches à cet égard nous ont valu le grand ouvrage qu’il a publié sous le titre de Théorie des fonctions analytiques, contenant les principes du calcul différentiel, dégagés de toute considération d’infiniment petits, d’évanouissants, de limites et de fluxions, et réduits à l’analyse algébrique des quantités