Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/131

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si c’était des différences finies, elles ont un caractère qui les distingue essentiellement de celles-ci : c’est qu’elles demeurent toujours indéterminées, de sorte qu’on reste maître, pendant tout le cours du calcul, de les rendre aussi petites qu’on le veut, sans rien changer à la valeur des quantités dont on cherche la relation ; ce qui fournit des moyens d’élimination qui n’appartiennent point au calcul ordinaire des différences finies, dans lequel ces différences sont fixes.


156. Il est facile de remarquer l’analogie qui existe entre la théorie des fonctions analytiques, celle du calcul infinitésimal ordinaire et la méthode des indéterminées dont nous avons parlé (119). En effet, les différences prises sans rien négliger, comme on le fait dans la théorie des fonctions analytiques, par la formule de Taylor, sont des séries. Or, comme l’observe Lagrange lui-même, tous les problèmes dont la solution exige le calcul différentiel dépendent uniquement du premier terme de chacune de ces séries, et toutes les méthodes n’ont d’autre but que de détacher et d’isoler, pour ainsi dire, ce premier terme du reste de la série. Le calcul différentiel ordinaire remplit immédiatement son objet, en négligeant, dès le premier moment, tous les autres, comme s’ils étaient nuls ; dans la méthode des indéterminées, on les sous-entend seulement comme devant nécessairement se détruire les uns par les autres dans le résultat du calcul ; dans la théorie des fonctions enfin, on les fait réellement entrer dans l’expression des conditions du problème, et on les dégage ensuite par diverses transformations fondées sur ce que tous ces termes ont pour facteur commun un accroissement de variable qu’on est maître de supposer aussi petit qu’on le veut, tandis que le premier terme de la série en est indépendant : ce qui rentre évidemment dans la méthode des indéterminées, par laquelle on est conduit à des équations dont chacun des termes pris séparément est égal à zéro.


157. Le véritable obstacle à l’adoption d’une méthode aussi lumineuse, est la nouveauté de l’algorithme pour lequel il faudrait abandonner celui qu’une longue habitude a consacré, et d’après lequel sont rédigés tous les ouvrages originaux qui ont paru depuis un siècle ; ainsi, par exemple, il faudrait re-