Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/132

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fondre toutes les collections académiques, tous les écrits d’Euler et ceux de Lagrange lui-même. Cette pensée était la sienne lorsqu’il publia la nouvelle édition de sa Mécanique analytique ; il n’y emploie point son algorithme, et voici comment il s’exprime à ce sujet, dans l’avertissement qu’il a mis à la tête de ce dernier ouvrage :

« On a conservé la notation ordinaire du calcul différentiel, parce qu’elle répond au système des infiniment petits adopté dans ce Traité. Lorsqu’on a bien conçu l’esprit de ce système, et qu’on s’est convaincu de l’exactitude de ses résultats, par la méthode géométrique des premières et dernières raisons, ou par la méthode analytique des fonctions dérivées, on peut employer les infiniment petits comme un instrument sûr et commode pour abréger et simplifier les démonstrations. »


158. Depuis quelques années, John Landen, savant géomètre anglais, avait tenté, non sans succès, de ramener le calcul infinitésimal à l’algèbre ordinaire. Lagrange, qui se plaisait à faire ressortir le mérite des autres, parce qu’il se sentait assez riche de ses propres découvertes, cite honorablement John Landen, et voici comment il s’exprime à ce sujet :

« C’est pour prévenir ces difficultés qu’un habile géomètre anglais, qui a fait dans l’analyse des découvertes importantes, a proposé dans ces derniers temps de substituer à la méthode des fluxions jusqu’alors suivie scrupuleusement par tous les géomètres anglais, une autre méthode purement analytique et analogue à la méthode différentielle, mais dans laquelle, au lieu de n’employer que les différences infiniment petites ou nulles des quantités variables, on emploie d’abord les valeurs différentes de ces quantités, qu’on égale ensuite après avoir fait disparaître par la division le facteur que cette égalité rendait nul. Par ce moyen, on évite à la vérité les infiniment petits et les quantités évanouissantes, mais les procédés et les applications du calcul sont embarrassants et peu naturels, et on doit convenir que cette manière de rendre le calcul plus rigoureux dans ses principes, lui fait perdre ses principaux avantages, la simplicité de la méthode et la facilité des opérations. »