Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La théorie des fonctions analytiques n’est peut-être pas elle-même exempte d’une partie de ces inconvénients ; c’est à ceux qui ont acquis l’habitude de s’en servir qu’il appartient d’en juger.


conclusion générale

159. Les diverses méthodes dont nous avons donné l’idée dans cet écrit ne sont, à proprement parler, qu’une seule et même méthode présentée sous divers points de vue. C’est toujours la méthode d’exhaustion des anciens, plus ou moins simplifiée, plus ou moins heureusement appropriée aux besoins du calcul, et enfin réduite en un algorithme régulier.

Mais cet algorithme est d’une haute importance, il est pour la méthode d’exhaustion ce qu’est l’algèbre ordinaire pour la pure synthèse ; les anciens ne connaissaient que la synthèse et la méthode d’exhaustion, qui n’est elle-même qu’une branche de la synthèse : les modernes, en imaginant l’algèbre ordinaire et l’algorithme infinitésimal, se sont procuré des avantages immenses. C’est un instrument avec lequel ils abrègent et facilitent le travail de l’esprit, en le réduisant pour ainsi dire en travail mécanique. Les symboles algébriques ne sont pas seulement ce qu’est l’écriture à la pensée, un moyen de la peindre et de la fixer, ils réagissent sur la pensée même, ils la dirigent jusqu’à un certain point, et il suffit de les déplacer sur le papier, suivant certaines règles fort simples, pour arriver infailliblement à de nouvelles vérités.


160. Les symboles algébriques font plus : ils introduisent dans les combinaisons des formes purement imaginaires, des êtres fictifs qui ne peuvent exister ni même être compris, et qui cependant n’en sont pas moins utiles. On les emploie auxiliairement comme termes de comparaison, pour faciliter le rapprochement des véritables quantités dont on veut obtenir la relation, et on les élimine ensuite par des transformations qui ne sont elles-mêmes pour ainsi dire que l’ouvrage de la main.

Cet admirable instrument des sciences exactes n’a pu être que le produit des recherches accumulées des plus profonds génies et peut-être de quelques hasards heureux. Mais il ne faut pas perdre de vue que ce n’est qu’un instrument fait pour