Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la valeur de chacune des fractions , lesquelles sans cela resteraient indéterminées, oblige à les comparer avant qu’elles s’évanouissent entièrement. D’ailleurs toutes ces quantités doivent être éliminées, et peuvent l’être sans leur attribuer aucune valeur déterminée : c’est donc au moins une chose superflue que de les supposer égales à zéro ; c’est particulariser la question quand on peut s’en dispenser, et par conséquent c’est la résoudre d’une manière moins élégante.


174. Le mérite essentiel, le sublime, on peut le dire, de la méthode infinitésimale, est de réunir la facilité des procédés ordinaires d’un simple calcul d’approximation à l’exactitude des résultats de l’analyse ordinaire. Cet avantage immense serait perdu, ou du moins fort diminué, si à cette méthode pure et simple, telle que nous l’a donnée Leibnitz, on voulait, sous l’apparence d’une plus grande rigueur soutenue dans tout le cours du calcul, en substituer d’autres moins naturelles, moins commodes, moins conformes à la marche probable des inventeurs. Si cette méthode est exacte dans les résultats, comme personne n’en doute aujourd’hui, si c’est toujours à elle qu’il faut en revenir dans les questions difficiles, comme il paraît encore que tout le monde en convient, pourquoi recourir à des moyens détournés et compliqués pour la suppléer ? Pourquoi se contenter de l’appuyer sur des inductions et sur la conformité de ses résultats avec ceux que fournissent les autres méthodes, lorsqu’on peut la démontrer directement et généralement, plus facilement peut-être qu’aucune de ces méthodes elles-mêmes ? Les objections que l’on a faites contre elle portent toutes sur cette fausse supposition, que les erreurs commises dans le cours du calcul, en y négligeant les quantités infiniment petites, sont demeurées dans le résultat de ce calcul, quelque petites qu’on les suppose ; or c’est ce qui n’est point : l’élimination les emporte toutes nécessairement, et il est singulier qu’on n’ait pas aperçu d’abord dans cette condition indispensable de l’élimination le véritable caractère des quantités infinitésimales et la réponse dirimante à toutes les objections.


Séparateur