Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/147

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Mais puisque n est la fortune du joueur avant l’événement et m après, le résultat du calcul qui donne annonce que le joueur a perdu au lieu de gagner, c’est-à-dire que pour redresser l’hypothèse sur laquelle le calcul était établi, il faut regarder x comme représentant une perte et non un gain, et pour ne pas altérer par là l’exactitude du calcul, il faut en même temps changer le signe, ce qui donnera alors

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8. Ce raisonnement peut s’appliquer à tout autre cas, mais il n’est pas nécessaire de le répéter à chaque fois, de même qu’il n’est pas nécessaire de répéter la démonstration d’une proposition quelconque chaque fois qu’on en fait usage, il suffit qu’on puisse la donner au besoin ; de même il suffit d’avoir établi le principe fondamental, pour demeurer convaincu qu’il est plus qu’inutile de recourir à des assertions aussi étranges que celle de dire, par exemple, qu’une perte est un gain négatif ; ce n’est pas parce qu’une perte est un gain négatif qu’il a fallu substituer —x à x et changer en même temps la dénomination de gain en celle de perte ; mais uniquement parce qu’on s’était trompé dans la mise en équation, en appelant gain ce qui était perte. Il a donc fallu rétablir la véritable dénomination, et rectifier en même temps la fausse conséquence qu’on avait tirée de la première supposition.

On peut bien, dans la conversation, dire qu’une perte est un gain négatif, parce que les expressions figurées y sont admises ; mais elles sont absolument inintelligibles en mathématiques. Supposons que des joueurs assis autour d’une table soient convenus que le dixième du profit sera mis dans un tronc pour les pauvres : ne rirait-on pas de celui qui à la fin du jeu viendrait réclamer 100 écus sur le tronc, sous prétexte qu’ayant fait un gain négatif de 1000 écus, il doit retirer du tronc autant qu’il y aurait mis si son gain eût été positif ? Ne lui dirait-on pas : nous comprenons tous que vous avez perdu 1000 écus, et nous en sommes fâchés pour vous, mais il n’en faut pas moins que vos 100 écus restent dans le tronc, parce que votre langage, tout clair qu’il est pour dépeindre votre aventure, n’est pas celui dont on se sert quand il s’agit de complet ? dans le calcul il faut appeler chaque chose par son nom.