Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/33

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venu à en éliminer les quantités infinitésimales dont je viens de parler, et que je l’ai ramené à ne plus renfermer que des quantités algébriques ordinaires. Jusque-là je ne regarde mon calcul que comme une simple méthode d’approximation. Ceux qui pour concilier la rigueur du calcul, dans tout le cours des opérations, avec la simplicité de mon algorithme, ont imaginé de considérer les quantités infiniment petites comme absolument nulles, ne se dispensent point de l’élimination dont je viens de parler ; et sans contester la justesse de leur métaphysique, j’observe qu’ils ne gagnent rien sur moi relativement à la simplicité des procédés, qui sont toujours les mêmes, et qu’ils rencontrent une autre difficulté : c’est que tous les termes de leurs équations s’évanouissent en même temps ; de sorte qu’ils n’ont plus que des zéros à calculer, et les rapports indéterminés de 0 à 0 à combiner. Ne vaudrait-il pas autant mes quantités infinitésimales telles que je les avais d’abord proposées, c’est-à-dire considérées comme moindres que toute grandeur imaginable ? De purs zéros sont-ils plus faciles à concevoir ? En regardant mes quantités inappréciables comme chimériques, ne pourraient-elles pas aussi bien que ces zéros purs être comparées l’une à l’autre ? Concevez-vous mieux ce qu’est une quantité imaginaire, telle , qu’une quantité inappréciable ? Et cependant hésitez-vous à dire que le rapport de à est  ? Les mathématiques ne sont-elles pas remplies de pareilles énigmes ? et ces énigmes ne sont-elles pas ce qui distingue essentiellement l’analyse de la synthèse, et même ce qui fournit à la première ces ressources précieuses dont manque la seconde ? Si je vous demande ce que signifie une équation dans laquelle il entre des expressions imaginaires, comme dans le cas irréductible du troisième degré, vous me répondez que cette équation ne peut servir à connaître les véritables valeurs de l’inconnue, que quand, par des transformations quelconques, on est parvenu à en éliminer les quantités imaginaires : je vous réponds la même chose pour mes quantités inappréciables ; je ne les emploie que comme auxiliaires ; je conviens que mon calcul n’est rigoureusement exact que lorsque je suis parvenu à les éliminer toutes jusqu’alors il n’est point achevé, et il n’est pas sus-