Page:Carré - Le Parlement de Bretagne après la Ligue.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
Origines du parlement de Bretagne.

gage français » ; qu’ils introduiraient en Bretagne les règlements, le style et les formes observées dans d’autres Parlements. Il espérait surtout que, n’ayant point d’attaches en Bretagne, ces magistrats ne sacrifieraient point les intérêts de la couronne à ceux de la province[1]. François Ier avait adopté à l’égard de la Normandie la politique que son fils pratiqua vis-à-vis de la Bretagne. Il avait même songé à ne plus nommer de Normands aux charges souveraines qui devenaient vacantes à Rouen[2]. La Normandie était cependant un pays d’élection et le pouvoir central y dut rencontrer beaucoup moins d’obstacles que dans un pays d’États comme la Bretagne. Invoquant sans cesse des privilèges que les rois de France avaient dû reconnaître, les Bretons avaient une foule d’occasions de mettre en échec l’autorité royale. Si Henri II eût laissé des « originaires » occuper toutes les charges de la Cour, il aurait vu cette compagnie fournir bien vite un aliment nouveau à l’esprit d’indépendance provinciale. Noël du Fail, qui fut conseiller au Parlement de Rennes dans la seconde moitié du xvie sièclee siècle, a donné de l’institution des « non-originaires » une curieuse explication ; son héros, Eutrapel, les compare aux hommes d’armes que le Roi envoie à cent lieues et plus pour « tenir garnison » pendant trois ou quatre mois, dans telle ou telle province ; il paraît voir en eux des juges plus étroitement soumis au Roi que les « originaires » et assez capables de résister aux influences locales, de s’opposer aux « brigues, faveurs et corruptions qui coustent plus aux parties que le

  1. Bibliothèque de Rennes, ms. 170, fo 17 vo. Archives d’Ille-et-Vilaine ; C. 2643, fo 106 (31 décembre 1590). Cf. La Roche-Flavin : Treize livres des Parlements de France (Bordeaux, 1617), fo 19 et 20.
  2. Floquet, Histoire du Parlement de Normandie (Rouen, 1840-1842), t. I, p. 451 et 456.