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sœur de sa maitresse. L’empereur alors arriva à Rome avec le grand duc de Toscane son frere, et quelqu’un qui etoit à la suite de l’un ou de l’autre de ces princes ayant fait connoissance avec cette fille, Medini sortit de prison, et partit de Rome peu de jours après. Nous retournerons à lui dans quatre ou cinq mois.

Je vivois toujours dans les mêmes habitudes. Le soir chez la duchesse de Fiano, tous les après diners que la princesse de Santa Croce, et chez moi ou j’avois Marguerite, la Buonacorsi, et le jeune tailleur qui s’appelloit Marcuccio Menicuccio, et qui à force de me parler de ses amours me donna envie de connoitre l’objet de sa flamme.

La fille qu’il aimoit etoit dans une espece de couvent où on avoit obtenu la grace de la placer par charité lorsqu’elle avoit l’age de dix ans, et d’où elle ne pouvoit sortir que pour se marier avec la permission du cardinal qui presidoit à l’economie, et à la police de cette maison pieuse. Les filles qu’on y gardoit obtenoient en sortant de là deux cens ecus romains qu’elles portoient en dot à ceux qu’elles epousoient. celui dont elles Marcuccio Menicuccio avoit sa sœur dans ce même couvent, que quelque fois il alloit voir. Elle venoit à la grille avec la gouvernante dont elle religieuse à la quelle elle etoit recomandée dependoit, et qui avoit soin de son education : malgrè que Marcuccio Menicuccio fût son frere, les lois de la police du couvent ne permettoient pas qu’elle allât à la grille toute seule. Sa sœur un jour, il y avoit alors cinq à six mois, etoit venue à la grille avec son amie, que Marcuccio une jeune camarade que Menicuccio n’avoit jamais vue. ; et cCe fut dans ce jour là qu’il en devint amoureux. Ètant obligé de rester à travailler dans sa boutique les jours ouvriers, il alloit voir sa sœur tous les jours de fête ; mais elle ne venoit