acte. Je lui ai repondu que je me trouvois en état de lui raconter une
histoire de six heures tres interessante eu egard aux details ; mais que
je ne pouvois la narrer qu’en recevant auparavant carte blanche, car
il y avoit des circonstances que je devois peindre trop d’après nature.
Le Cardinal me demanda si c’étoit quelque chose dans le gout des
veilles avec Marie MathildeM. M., et ayant entendu que c’étoit precisement
dans ce gout là, il demanda à la princesse, si elle vouloit être
sourde. Elle repondit que je pouvois compter sur cela, et je leur ai
narré toute l’histoire à peu près dans les mêmes termes dont je
me suis servi pour l’écrire. Les huitres ramassées, et le Colin-maillard
la firent rire malgrè sa sourdité. Elle convint à la fin
avec le Cardinal que je m’étois bien conduit, et elle se trouva sûre
que je finirois l’ouvrage à la premiere occasion. Le Cardinal me
dit que dans deux ou trois jours j’aurai une dispense des publication
pour le pretendu d’Emilie avec la quelle il pourra l’epouser
partout où il voudra.
Le lendemain à neuf heures Monsieur +++ vint me voir, et je l’ai trouvé tel que la marquise me l’annonçoit ; mais j’avois une dent de lait contre lui à cause du compliment, et qui augmenta lorsqu’il me demanda si la demoiselle qui étoit avec moi etoit mariée, ou engagée, et si elle avoit pere, et mere, ou autres parens de qui elle pouvoit dependre. Je l’ai prié avec un sourire un peu amer de me dispenser de l’informer de ce qui pouvoit regarder cette demoiselle, puisqu’au théatre elle étoit en masque. Il rougit, et me demanda pardon. En le remerciant de l’honneur qu’il avoit fait à Marguerite en acceptant d’elle une tasse de caffé, je l’ai prié de me faire le même plaisir en l’assurant que j’irois dejeuner chez lui le lendemain. Il demeu-