Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/109

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S. Jacques de Compoſtelle dont je porte le nom devoit naturellement être par moi regardé comme mon principal patron, mais comment pouvois-je le croire pendant que ce fut préciſement dans le jour de ſa fête que Meſſer grande vint enfoncer ma porte ? Si je devois prier le ſaint mon protecteur il me ſembloit que le jéſuite auroit dû me le nommer : j’ai cru qu’il s’agiſſoit de le choiſir. Examinant l’almanac, j’ai jetté un dévolu ſur le plus voiſin, qui étoit S. Marc. S. Georges venoit avant lui, ſaint de quelque renommée, mais j’ai cru de devoir confier beaucoup plus dans l’évangeliſte, d’autant plus qu’en qualité de venitien j’avois droit de réclamer ſa protection : je n’ai donc pas manqué de lui adreſſer mes vœux, mais ſa fête paſſa, et me voyant encore là je me ſuis recommandé à l’autre S. Jacques dont on célébre la fête avec S. Philippe, mais elle paſſa ſans que je me viſſe exaucé. Je me ſuis alors adreſſé avec beaucoup de dévotion au ſaint Taumaturge S. Antoine, dont j’avois viſité le tombeau mille fois dans le tems de mes études à Padoue ; mais j’ai auſſi eſpéré en vain. J’ai été ainſi d’un autre à un autre, et inſenſiblement je me ſuis accoutumé à eſpérer en vain,