Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/120

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caſſerole qui étoit pleine de terrazzo ; je l’ai garnie de nouveau, et nous nous vîmes éclairés. J’ai beaucoup diverti mon cher compagnon en lui faiſant le détail de la création de ma lampe. Nous avons paſſé la nuit ſans dormir, non pas tant à cauſe d’un million de puces, qui nous dévoroient, comme de cent discours intéreſſans qui ne finiſſoient jamais. Mais lorsqu’il me vit curieux de ſavoir par quelle malheureuſe aventure je poſſédois ſa chère compagnie, voilà ce qu’il n’eut aucune difficulté de me dire, et que je crois de pouvoir publier au bout de trente deux ans de ſilence.

« Hier à vingt heures nous montâmes dans une gondole Madame Aleſſ…, le comte P. Mart., et moi, et arrivâmes à Fuſine à vingt une : nous fûmes à Padoue à vingt-quatre pour voir l’opera, et repartir d’abord après. Au ſecond acte mon mauvais génie me fit aller à la ſalle du jeu, où j’ai vu le comte de Ros… ambaſſadeur de Vienne, et peu loin de lui Madame de R… dont le mari doit partir un de ces jours pour aller à la même cour en qualité d’ambaſſadeur de Veniſe ; j’ai fait ma révérence muette à Monſieur qui n’étoit pas en masque, et j’ai fait